Climat: ce que la France veut pour Copenhague

Publié le par evergreenstate

http://www.mediapart.fr/article/offert/6daddfc55998a404401710949345d96d


Climat: ce que la France veut pour Copenhague
  • C'est le plan français pour Copenhague: Mediapart a obtenu copie du «plan justice climat» (à lire ici), un projet d'accord international sur le climat pour sortir de l'impasse actuelle des négociations cherchant à donner une suite au protocole de Kyoto. Intitulé Un projet pour le monde, il fixe des objectifs de réduction d'émission de gaz à effet de serre pour les pays industrialisés (80% de réduction en 2050 par rapport à 1990, entre 25% et 40% en 2020) et surtout établit un plan massif d'aide internationale pour les pays les plus vulnérables au changement climatique: l'Afrique, les pays les moins développés (PMA), les Etats insulaires.

     

    Il préconise la création d'un fonds justice climat pour financer la mutation des secteurs de l'énergie, la reforestation, la protection des ressources en eau et des régions côtières, la lutte contre l'érosion des rivières et les travaux d'infrastructure. Coût total de ce plan justice climat: 410 milliards de dollars sur 20 ans. Quatre catégories de pays sont distingués: les plus pauvres et les plus vulnérables, les pays en développement peu émetteurs de carbone, les grands émergents, les Etats industrialisés.

     

    Ce fonds justice climat devrait être géré par les donateurs et les bénéficiaires. Le projet ne se prononce pas sur un rôle éventuel du FMI, de la Banque mondiale ou de l'ONU, actuel sujet de controverse entre les pays. En revanche, il fait toute une série de propositions de mécanismes de financement innovantes: une taxe mondiale sur les transactions financières (la taxe Tobin), une taxe sur le change, une taxe sur les actions. Sont également cités en annexe d'autres mécanismes de financement: une taxe sur le fret maritime, la proposition formulée par les Suisses de lever une taxe carbone universelle, une taxe sur la baril de pétrole.

     

    Beaucoup de ses propositions ont été discutées ces derniers mois... et pour certaines rejetées (notamment la proposition suisse). Quel sens cela peut-il avoir de les réactiver à quelques jours du sommet Copenhague? Il est peu probable qu'elles puissent aujourd'hui obtenir un consensus jusqu'ici introuvable. 

«38e ou 40e version»

Le texte évoque également l'idée d'une contribution financière universelle pour lutter contre le changement climatique, payée par tous les pays à l'exception des moins développés. Chaque Etat contribuerait en fonction de son niveau de développement (mesuré par son PIB) et de son niveau d'émissions de gaz à effet de serre (actuelles et historiques).

 

Le fonds «Justice climat» veut s'ajouter aux actuels fonds et mécanismes finançant l'aide internationale. Il s'agit donc bien d'argent qui viendrait en plus des fonds aujourd'hui en place. La demande «d'additionnalité» est elle aussi actuellement l'objet de vifs échanges entre pays pauvres et riches.

 

Sur le fond des stratégies proposées pour concilier développement des pays pauvres et économie d'énergie, le plan justice climat propose de faire de l'Afrique le premier continent à fonctionner à 100% grâce aux énergies renouvelables. La reforestation et la lutte contre la déforestation sont une autre priorité, ainsi que la construction de nouvelles infrastructures pour l'adaptation des pays les moins développés. Et leur protection contre les catastrophes climatiques: sécheresse, inondations, cyclones...

 

Le «projet pour le monde» propose enfin d'établir des règles communes de vérification des trajectoires de décarbonisation des uns et des autres ainsi que la création d'une organisation mondiale de l'environnement, idée défendue depuis quelques mois déjà par Nicolas Sarkozy. 

 

Préparé par la France, tenu jusqu'à présent dans la confidentialité, le plan justice climat a été défendu par la France en début de semaine à Copenhague, lors d'une réunion préparatoire au sommet du climat qui s'y tiendra du 7 au 18 décembre. Validé, selon l'entourage de Jean-Louis Borloo, par le premier ministre danois  Lars Lokke Rasmussen, qui en tant qu'hôte du sommet du climat joue aujourd'hui un rôle diplomatique actif, il en serait à sa «38e ou 40e version». «Il ne s'agit pas de la position française, on ne veut pas faire une opération de marketing. L'objectif est que le maximum de pays s'y retrouvent», précise-t-on encore, laissant également entendre que l'Union européenne soutient la démarche française.

 

«Pas une alternative à Copenhague»

 

Lors de précédents déplacements de Jean-Louis Borloo, le projet justice climat a déjà été présenté à l'Ethiopie , au Bangladesh, au Laos, à l'Inde. Lula le soutient, et la position franco-brésilienne sur le climat dévoilée le week-end dernier découle largement du plan justice climat, précise l'entourage de Jean-Louis Borloo. L'ancien secrétaire général des Nations unies Kofi Annan y serait aussi favorable.

 

«Faire un focus sur les pays les plus vulnérables et l'Afrique, c'est intéressant, commente Karine Gavand, chargée de campagne climat pour Greenpeace, mais il y a aussi des points noirs: les objectifs de réduction de déforestation sont inférieurs aux ambitions européennes et les 410 milliards de dollars annoncés ressemblent à de la poudre aux yeux. A priori le chiffre impressionne. Mais cela ne représente que 20 milliards de dollars par an, c'est le minimum

 

Quel statut a ce texte? S'agit-il d'une déclaration politique? Préfigure-t-il un traité cadre contraignant? Comment peut-il s'intégrer au processus international? Rien n'est dit à ce sujet. «Ce n'est pas une alternative à Copenhague», explique un proche du ministre français de l'écologie, qui reconnaît tout de même «qu'il s'agit par ce texte de trouver un accord alors qu'aujourd'hui on risque d'aller dans le mur».

 



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