Les ruches de l'est de la France se dépeuplent de façon inquiétante (archive)

Publié le par evergreenstate

Les ruches de l'est de la France se dépeuplent de façon inquiétante
LE MONDE | 12.06.08 | 14h28  •  Mis à jour le 12.06.08 | 16h08

es apiculteurs de l'Est de la France sont en alerte. Depuis le début du mois de mai, ils observent d'importants dépeuplements de leurs ruchers, le sud de l'Alsace étant le plus touché. "Les ouvrières partent butiner mais ne reviennent pas et le rucher finit par dépérir", constate Daniel Limon, président du Syndicat des apiculteurs professionnels d'Alsace, Lorraine et Champagne.

 

 

"La situation est préoccupante, certaines colonies ont totalement disparu, même dans les montagnes exemptes d'agriculture donc de pesticides", constate Raymond Borneck, président du Syndicat apicole du Jura. Pour lui, le responsable est Nosema ceranae, un champignon pathogène détecté pour la première fois dans cette partie de la France en 2005.

Les syndicats nationaux, en revanche, désignent d'autres coupables : les pesticides. "L'apiculture allemande est en crise. Le long de la vallée du Rhin, 90 % du cheptel est menacé par les phytosanitaires agricoles. Huit d'entre eux, dont le Poncho, viennent d'être interdits d'urgence par le gouvernement fédéral. Ces produits ne s'arrêtent pas à la frontière !", affirme Henri Clément, président de l'Union nationale des apiculteurs français. Yves Vedrenne, président du Syndicat national des apiculteurs, explique pour sa part qu'"il y a certainement plusieurs phénomènes conjugués dans l'Est de la France, mais les soupçons pèsent fortement sur les semis de maïs enrobés de Cruiser, un insecticide".

Il y a une quinzaine de jours, des échantillons ont été prélevés pour analyses dans des ruchers ayant subi des pertes. "Les premiers résultats montrent des quantités de spores de Nosema ceranae très élevées, de nature à entraîner la mort des abeilles", confirme Marie-Pierre Chauzat de l'Agence française de sécurité sanitaire et alimentaire (Afssa). Mais la scientifique reste prudente : "Il est difficile d'attribuer la disparition des ouvrières à la seule nosemose. Le symptôme peut être également dû au varroa, un acarien présent dans toutes les colonies d'abeilles." Il n'y a donc peut-être pas une mais plusieurs causes dont la synergie mène au dépeuplement massif et rapide des colonies d'abeilles.

"Depuis des années, les instances nationales sont focalisées sur les pesticides et ignorent les problèmes sanitaires causés par les parasitoses. C'est grave !", s'insurge Raymond Borneck, dont la colère ne fait que souligner à quel point le milieu apicole est divisé.

MANQUE DE FORMATION

Ce qui freine une organisation plus professionnelle de la filière. Les apiculteurs manquent de formation, peu de vétérinaires sont spécialisés, les agents des groupements sanitaires des abeilles sont des bénévoles... "Nous ne disposons même pas d'un institut technique pour nous donner des directives claires de lutte contre les maladies", déplore Daniel Limon. La création d'un tel institut, interface entre le monde académique et les professionnels de l'apiculture, fait cependant partie d'une proposition de résolution du député Jacques Remiller (UMP, Isère), déposée en octobre 2007.

 

En attendant, dans l'Est, l'heure est à l'inquiétude et à l'urgence. Le comité technique apicole d'Alsace a fait une demande de subvention auprès de la région, afin d'établir une cartographie sanitaire des exploitations professionnelles touchées. Une épidémie de nosemose en pleine saison de butinage serait une catastrophe économique d'autant que le Fumidil B, le seul antibiotique efficace, n'est pas autorisé à la vente en France.

 


Article paru dans l'édition du 13.06.08

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